Aussi loin que je me souvienne - ça fait belle lurette - nous avons toujours été cons.
Je veux parler de cette forme de niaiserie collective qui pousse une forte majorité
d'entre nous à penser la même chose au même moment. Une sorte de
mode, si vous voulez.
La mode stricto-sensu apparaît déja comme une aberration intelectuelle dans la
mesure où elle utilise le côté panurgique de l'humanité à des fins commerciales.
Toutefois ça reste inoffensif -sauf pour le portefeuille- et fait plaisir à ces dames.
Même à ces messieurs, de plus en plus semble-t-il, ce qui confirme avec éclat la
tapettisation de nos sociétés post-civilisationnelles.
En revanche, la mode de la pensée se révèle infiniment plus pernicieuse et
redoutable.
Elle conduit à commettre les pires stupidités, les fautes les plus dramatiques.
Elle pousse le populo à une convergence délétère vers des objectifs postulés.
Elle détruit toute forme de doute et de sens critique, elle occulte l'intelligence.
Elle constitue la cause première des guerres, des révolutions, des totalitarismes
et des erreurs historiques les plus lourdes de conséquences telle que, par exemple,
l'invasion plus ou moins librement consentie des pays d'Europe par des populations
réfractaires à toute assimilation.
Bien, mais je m'en voudrais de vous casser plus longtemps les roubignolles avec mon
verbiage assommant , j'en viens au fait.
Notre connerie collective d'aujourd'hui me semble encore plus crasse que celle d'antan.
Plus bêtasse, plus neu-neu, si vous voyez, carrément décérébrée. Peut être cela vient il
de l'indigence des maîtres à penser qui infestent les media, de nos jours et dont on se
demande par quel miracle ils parviennent à joindre tant de sottise à tant de prétentieuse
inculture ignare. C'est encore plus cul qu'avant parcequ'il n'y a même pas le moindre
commencement de réflexion à l'origine. On gobe tout cru, sans mâcher et on décide
que c'est bon. En plus il s'agit de phénomènes de courte durée, à obsolescence
programmée pourrait-on dire. On s'entiche un bon coup, pendant quelques jours,
quelques semaines au maximum, on en parle tout le temps et à tout propos.
Puis le soufflé retombe et on passe à autre chose.
Exemple récent autant qu'éminemment caractéristique : l'Obamania.
Qu'est-ce qu'on a pu nous bassiner avec cette couillonnade. Une folie collective,
surtout en Europe. Bizarrement, les Amerloques semblaient moins noeud que nous
sur ce coup là. Sans doute parcequ'ils se sentaient forcément plus concernés,ce qui
pousse, en général, à la circonspection. Sans parler des électeurs de Mac Cain,
lesquels savaient pertinemment qu'ils l'avaient dans l'os.
Là, maintenant, à l'heure où je mets sous presse, la mode est à la révolution.
Une fois n'est pas coûtume, cet engoûment formidablement puissant
bien que vraisemblablement éphémère, nous vient de la rive sud de la
méditerranée.
Entre nous et parenthèses, je fais gaffe. Comme je risque de me montrer un peu
critique vis à vis de nos amis d'Afrique du Nord, je sens bien que je marche sur
des oeufs. Ce n'est pas le jour, précisément, où notre belle Justice Républicaine
vient de condamner Eric Zemmour pour délit d'opinion - même si ça ne s'appelle
pas exactement comme ça, c'est pareil- qu'on va se mettre à dire du mal des
Diversités d'Afrique.
Etrange, tout de même. S'il avait déclaré, Zemmour, que la plupart des malfrats
viennent de Bourgogne, de Normandie ou même de Suisse Romande
( pas d'Auvergne, depuis le coup d'Hortefeux c'est mal vu), ça passait impec, sans
problème. Pourtant c'eût été un gros mensonge...
En somme c'est seulement la vérité qu'il ne faut pas dire.
La vérité tombe sous le coup de la loi. Au fond, il n'y a rien là de bien nouveau,
même le brave Guy Béhar ( Béart c'était au temps où il valait mieux franciser) s'en
était aperçu.
Allez, je reviens à nos moutons ( amini l'mouton! amini l'mouton! comme chantait
Maurice Chevallier).
Depuis l'explosion révolutionnaire démocratico-islamiste du Monde Arabe,
la Révolution accomplit une percée sans précédent dans l'imaginaire collectif par
media interposés. Et ne croyez pas que tous ces charmant jeunes gens échappés
de Tunisie à pleins bâteaux, jettent si peu que ce fût le discrédit sur la splendide
insurrection populaire et citoyenne de leurs compatriotes. Seul compte le geste.
Et le Peuple Tunisien, dont l'héroïsme intrépide vint à bout de l'infâme Ben Ali,
réussit à avoir la peau de ce dernier et sans guillottine délier, s'il vous plaît.
Un vulgaire AVC a suffi.
Cependant, en toute révolution il faut considérer le résultat. La tête du tyran se
trouvant quasiment au bout de la pique - ou bien au fond du panier de son, comme
vous préférez - les évènements nous rappellent des souvenirs un peu confus, mais
bien chers à nos vibrations républicaines. Du coup, notre glorieuse Nation fière de
son héritage de légitime et vengeresse rébellion contre le despotisme, les privilèges,
les aristos et le prix du pain, ne se sent plus pisser à la vue des exploits de ses
disciples Maghrébins.
Ils ont même leur Marie-Antoinette, les Tunisiens, l'épouse de Ben Ali. "La Coiffeuse",
ils l'appellent. Un peu comme nos glorieux ancètres Sans-Culottes surnommaient
la Reine de France "l'Autrichienne", ce qui les autorisa, ensuite, à la martyriser et
à la supplicier tout à loisir. Cependant l'art capillaire apparaîssant moins condamnable
que l'autricherie, la chetron de la dame Ben Ali-Trabelsi demeurera probablement sur
les épaules d'icelle. Surtout qu'elle s'est cassée à temps, la coiffeuse, ils peuvent
toujours courir pour se la coincer à Varennes. L'avantage de l'avion sur les voitures à
chevaux.
Même pas finie la Tunisienne, que la révolution Egyptienne éclatait! Alors là nous
attégnîmes quasiment l'orgasme. Le vent parfumé de la liberté tant désirée souffla
si joliment sur la Place Tahrir, qu'il finit par emporter aussi le tyran Moubarak, le
salopard qui avait maintenu pendant trente ans la paix du Monde. Cela, il devait le
payer un jour ou l'autre l'abject dictateur, comme il paierait aussi la chape de
plomb dont il avait recouvert les Frères Musulmans depuis l'assassinat de Sadate.
Dégage! Joli slogan. Nous, en 1789 on avait trouvé plus fleuri, plus littéraire mais
"dégage" ça sonne bien, ça fait moderne et puis, question efficacité on peut pas
contester. Nous aperçûmes même un prof franchouille expat au lycée du Caire qui
se faisait la manif en arborant une pancarte "casse toi pauvre con", histoire de
marquer à la fois sa solidarité avec la Révolution-Dégage et sa haine bien-pensante
de Nicolas Sarkozy. Ce dernier a tellement apprécié, que le prof en question s'est
retrouvé viré à gands coups de pompe dans le cul et ramené pede militari dans sa
bonne ville de Valenciennes, ou Maubeuge je ne sais plus. Voilà comment on
traite les plus dignes descendants du Grand Robespierre, chez nous. Honte à la
Sarkofrance qui ne reconnaît même plus ses révolutionnaires à doubles émoluments!
Dégagé, donc Moubarak. Ils ont tout gagné les Egyptiens, une dictature militaire en
échange d'un régime relativement libéral. Tout cela en attendant l'arrivée des Frangins-
Muzz qui, tapis dans l'ombre propice des Héros de la Révolution, se préparent à
sauter sur le pouvoir aussitôt que les élections libres et démocratiques exigées par
Barack-Hussein Obama leur en offriront l'occasion.
En tout cas, nous Franchouilles et même Occidentaux en général, nous exultons, nous
tapons gentiment dans nos petites mimines pour applaudir au nouveau vent du sud, si
rafraîchisant, si réconfortant, si pur.
Même les Belges qui nous font le coup de la Révolution des Frites pour exiger leur
gouvernement impossible. Ils sont vraiment... Belges ces mecs. La Belgique n'a jamais
aussi bien marché. Ils ont même résorbé leur déficit budgétaire ces rigolos, tellement
qu'un gouvernement ça dépense sans compter, n'importe comment. La voilà, la
solution : plus de gouvernement c'est la prospérité et la tranquillité du contribuable.
S'il faut faire la révolution c'est pour arriver à ça, se débarrasser des gouvernants et
surtout pas les remplacer.
Combien de temps va t-elle durer cette jolie mode de la révolution?
Difficile à dire. Ca pète de tous le côtés dans le Monde Arabe. Seulement
Ben Ali et Moubarak c'étaient des gentils, propres à se laisser persuader par
Barack ou même Hillary (comme une baleine) de la cuisson définitive des carottes
et de la nécessité de foutre le camp sans demander son reste.
Avec des pointures comme Khadafi ou le Roi de Barheïn ce n'est pas le même cierge
qui coule. Les mecs, la beauté intellectualisée de la révolution, ils s'en secouent le
bigoudi. Ils flinguent dans le tas tant qu'ils en voient qui bougent. L'Algérie c'est
plus fragile mais ça reste un peu pareil. Le succès de la révolution équivaut à celui
du FIS ce qui constitue une perspective d'autant plus enthousiasmante qu'Al Qaïda
se cache derrière. Mieux vaut encore l'armée sous couvert du débris Bouteflika.
Et puis, les Algériens, s'ils ont de l'énergie à dépenser en révolution, ils auraient
intérêt à la faire carrément en France. Aucun risque de se faire amocher, les flics
ne veulent plus aller en taule, c'est gagné d'avance.
Allez, je vous laisse. Mais je sens qu'on n'a pas fini d'en parler.
En tout cas, vive la Révolution, c'est tendance!
W. la trendy revolution et merde pour qui ne me lira pas.